• Médecine traditionelle

    MONDULKIRI

    Les jeunes ne s'intéressent pas du tout à la médecine traditionnelle.

    Parfois dénigrée au profit de la médecine moderne, la médecine traditionnelle est pourtant le seul accès aux soins de la majorité des Bunong du Mondulkiri. Praticiens et ONG se mobilisent pour tenter de préserver ces savoirs.

    Village de Pu Ndreng, Mondulkiri. Depuis Sen Monorom, il faut rouler une bonne demi-heure pour atteindre ce petit village Bunong, situé dans le district d'O'reang. Et traverser tout le village pour se rendre chez Sopun, le rebouteux. Il reçoit chez lui, dans sa petite maison en bois, sans éclairage, avec le sol en terre battue. Paisiblement, il s'assoit sur l'estrade en bois qui lui sert de lit. Un sourire doux ne quitte jamais son visage. Casquette bleue délavée par le soleil, chemise blanche, pantalon en toile et pieds nus, Sopun déborde de charisme. Une moto arrive. Rapidement, un petit attroupement se forme. Le conducteur interpelle Sopun qui le rejoint lentement, sans jamais se départir de son sourire et enfourche la moto, avec une facilité étonnante pour ses 79 ans. Un jeune homme d'un village voisin vient de se blesser le bras en chutant à moto. Sopun doit se rendre auprès de lui au plus vite. Il emporte juste le petit sac en bandoulière qui contient ses onguents. Pour réparer un os cassé, il utilise une sorte de gingembre considéré comme magique. À l'occasion de sa venue, la famille du malade organise une cérémonie avec de l'alcool, un poulet, du riz, des bougies et de l'encens. Lorsque le blessé est guéri, Sopun est rappelé pour assister à une cérémonie identique. Une routine qu'il connait depuis ses 30 ans, âge auquel il a été désignée Kruu Boran (médecin traditionnel) à la suite d'une cérémonie. Il détient la plupart de ses connaissances de son père, qui fut lui-même Kruu Boran. Mais des rêves peuplés d'esprits l'ont également aidé à comprendre la médecine traditionnelle.

    Six sortes de médecins traditionnels

    Très réputé, Sopun s'est occupé d'environ 10.000 patients au cours de sa carrière. Certains viennent de très loin pour se faire soigner une fracture. De Kratie ou de Pursat par exemple. Des gens le consultent également en cas de maladie ou après un accouchement difficile. Si les médecins traditionnels peuvent être répartis en six catégories, ils ne sont pas confinés à cette seule spécialité. Le Bu Blao Nam Tchi, ou l'herbaliste qui connait les vertus des plantes et les utilise pour soigner différents maux. Le Bu Blao Chian Klet, ou rebouteux qui s'occupe des fractures, des entorses et tendinites. La Bu Blao Gnot Ndol, ou l'accoucheuse, accompagne les mères pendant leurs grossesses, se chargent de l'accouchement. Le Bu Blao Pol, ou devin, est quant à lui en mesure d'interroger l'avenir. Le Kruu Beut est une personne qui sait comment sucer les maux et les infections. Enfin, le Bu Blao Nang, ou le sorcier qui connait la magie noire. On fait appel à lui quand les médecines traditionnelles et occidentales sont impuissantes.
    Toutefois, « le médecin traditionnel n'est pas forcément le premier référent », comme l'explique Nicolas Savajol, directeur technique chez Nomad recherche et soutien international (Nomad RSI), une association qui promeut la diversité thérapeutique et la protection de l'environnement dans le Mondulkiri. Étant donné que ces médecins communiquent avec les esprits, le sentiment d'avoir commis une faute dont la maladie serait la punition peut être un motif de consultation. Tout comme l'absence de résultat après avoir fait appel à la médecine moderne. Ou un manque de moyens. « Avec Sopun, c'est entre 50 et 100 $ le traitement », explique Vanny Tuon, un Bunong devenu guide, avant d'ajouter : « Ça peut paraître cher mais c'est beaucoup plus cher de se faire soigner à l'hôpital entre les soins, le coût de la chambre... En plus, les patients paient seulement quand ils sont guéris ».

    Ils ont d'autres problèmes que de préserver leurs plantes .

    Respecté par tous dans la communauté Bunong, le métier de rebouteux ne suscite pourtant pas beaucoup de vocations. « Les jeunes ne s'intéressent pas du tout à la médecine traditionnelle mais ils viennent quand même me voir quand ils ont un problème », remarque Sopun. Pour préserver les plantes médicinales, l'ONG Nomad RSI a, un temps, envisager de créer des jardins dédiés. Toutefois, comme l'explique Nicolas Savajol, « les médecins traditionnels étaient intéressés mais pas les gens de village. Ils ont d'autres problèmes que de préserver leurs plantes ». Un désintérêt dangereux puisque les médecins traditionnels, souvent âgés, sont les seuls garants de ces traditions basées sur l'oralité. C'est pour préserver cette diversité culturelle et faire reconnaître ces traditions que Nomad RSI s'est mobilisée. Dès 2003, le botaniste Antoine Schmitt étudie les plantes qui permettent de soigner les fièvres et les problèmes intestinaux. En 2008, un financement du Fonds français pour l'environnement mondial permet de collecter les plantes, de créer des herbiers et d'intégrer ces savoirs dans une base de données pour les protéger des grands groupes pharmaceutiques. Aujourd'hui, toutes ces données sont consultables librement au Centre de ressources et de documentation situé dans la rue principale de Sen Monorom mais, faute de financement, les recherches ont été arrêtées.

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